C’est quand on apprend à parler vraiment de soi-même qu’on redevient en vie.
Quand on rend l’autre responsable de ce qu’on ressent, on reste prisonnier de la relation. Quand on commence à sortir de la plainte (“je suis manipulé”) alors on atteint les vrais sentiments (“je suis triste et en colère”) et besoins à soi (“j’ai besoin de respect pour ma personnalité”).
Thomas d’Ansembourg, formateur en Communication Non Violente, parle de la “recherche de la parole vraie”. Cette parole n’est pas à prendre comme les mots qui vont être dits à l’autre mais comme la parole qui permet d’accéder à la lucidité intérieur, à la clarification de ce qui se passe en soi.
Cette recherche de la parole vraie a l’immense pouvoir d’éclairer notre conscience relativement aux vrais enjeux qui sous-tendent les enjeux apparents et de conduire à la responsabilité individuelle (et donc la liberté).
Cette démarche de clarification passe notamment par l’utilisation de mots à propos des émotions ressenties qui parlent de soi et ne font pas portés la responsabilité de ces émotions à l’autre. C’est un travail difficile car il présuppose d’apprendre à se situer par rapport aux émotions ressenties avec vulnérabilité et authenticité. Combien d’entre nous ont du mal à aller au-delà du “ça va/ ça va pas” ou “je me sens bien/ pas bien” ? Parfois même, nous allons répondre à une question sur nos émotions par une pensée, un concept ou un commentaire.
Tant que nous attribuons à l’autre la responsabilité de ce que nous vivons, nous nous déresponsabilisons; tant que nous lui donnons les clés de notre bien-être (et de notre mal-être), nous nous piégeons. – Thomas d’Ansembourg
Thomas d’Ansembourg nous invite donc à différencier, dans le vocabulaire des émotions et sentiments, ceux qui comportent une interprétation ou un jugement sur l’autre de ceux qui expriment une émotion personnelle, authentique.
Certains mots comme “trahi, abandonné, manipulé, rejeté” traduisent des états d’âme, des ressentis mais ils véhiculent en même temps une image sur l’autre, une interprétation, un jugement. Celui ou celle à qui ces mots sont adressés entend : “tu es un traître/ une manipulatrice/ tu m’abandonnes et c’est mal”.
Ils s’agit alors de se mettre à l’écoute du sentiment qui nous habite derrière cette impression de manipulation : cela peut-être de ma colère et de la fatigue par exemple.
Mettre des mots sur les émotions “vraies” permet dans un deuxième temps d’écouter les besoins profonds qu’elles indiquent (par exemple, s’accueillir davantage, se faire à soi-même plus de place en s’autorisant à vivre davantage de son identité propre, donner le meilleur de soi-même).
Les avantages à distinguer sentiments authentique et sentiments d’interprétation
1.Cheminer vers nous-même
Quand nous nous déresponsabilisons de ce que nous vivons, ressentons et pensons, nous donnons le pouvoir à l’autre de déterminer notre malheur et notre bonheur. Mais nous lui faisons aussi porter ce fardeau (culpabilisation, peur des représailles, honte, perte d’estime de soi…).
2.Se faire comprendre en vue d’une coopération (plutôt qu’un affrontement)
Quand on arrive à différencier les sentiments vrais des sentiments teintés d’accusation, l’autre n’est pas tenté de se défendre en attaquant (justification, argumentation, contre attaque…) ou en fuyant (fuite physique ou détournement du sujet). L’intention ici est la qualité de la rencontre avec l’autre. Thomas d’Ansembourg regrette que beaucoup d’entre nous manquent de la présence nourrissante qui naît de la rencontre (avec soi-même et avec les autres).
Nous ne souhaitons pas seulement que l’autre entende nos mots, nous souhaitons qu’il écoute ce qui se passe en nous. Tout comme lorsque nous l’écouterons à notre tour, nous ne souhaiterons pas seulement entendre les mots qu’il dit, mais écouter ce qui se passe en lui. – Thomas d’Ansembourg
Reconnaître la nature des mots exprimant des sentiments (émotion vraie ou émotion teintéée de jugement)
Pour nous faciliter le travail vers une “épuration” de notre conscience et de notre langage par la suppression de ce qui génère opposition, division et séparation, Thomas d’Ansembourg propose une liste des sentiments teintés de jugement, des “sentiments étiquettes”:
- abandonné
- acculé
- arraché
- attaquée
- blâmé
- culpabilisé
- déconsidéré
- délaissé
- détesté
- dévalorisé
- diminué
- dominé
- dupé
- écarté
- écrasé
- exclu
- floué
- humilié
- ignoré
- incompris
- intimidé
- invisible
- jeté
- jugé
- laissé pour compte
- manipulé
- méprisé
- mis sous pression
- négligé
- pas accepté/ pas aimé
- pas cru
- pas entendu
- pas important
- piégé
- rabaissé
- rejeté
- ridiculisé
- sali
- trahi
- utilisé
Quand ce type de mots affleurent à notre conscience, nous pouvons creuser ce qu’ils nous disent et les transformer en mots qui expriment des émotions vraies.
Voici quelques exemples :
Je me sens abandonné.e -> proposition : Je me sens seul.e et triste (et pour aller plus loin sur les besoins : Et j’ai besoin d’être rassuré.e sur le fait que je compte pour toi, que j’ai ma place dans ton coeur.)
Je me sens trahi.e -> proposition : Je suis à la fois terrorisée, en colère et tellement triste (et pour aller plus loin sur les besoins : J’ai absolument besoin de compter sur la confiance mutuelle et la franchise dans mon couple parce que je veux trouver du sens à vivre en couple, j’ai besoin de me sentir en sécurité, j’ai besoin de respect pour donner le meilleur de moi-même dans la relation” )
Nous pouvons également essayer de faire la même chose que ce sont les autre qui utilisent des sentiments étiquettes pour s’adresser nous. Que veut dire quelqu’un qui nous dit qu’il se sent utilisé par nous ? Quelles émotions vraies se cachent derrière cette émotion teintée de jugement ? Quels sont ses besoins (de surface et en profondeur) ? Qu’est-ce qu’il exprime de manière tragique mais qu’il pense être au service de la vie ?
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Source : Cessez d’être gentil, soyez vrai ! de Thomas d’Ansembourg (Les éditions de l’Homme)
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