3 ennemis de l’amour dans un couple (selon l’Analyse Transactionnelle)
Dans son livre Des scénarios et des hommes, Claude Steiner cite 3 ennemis de l’amour. Il estime que le sexisme, le jeu de Sauvetage et les jeux de Pouvoir empêchent la réalisation de rapports satisfaisants et amoureux entre hommes et femmes.
Il avertit qu’il ne parle que des rapports hétérosexuels parce qu’il n’a travaillé qu’avec des couples hétérosexuels en tant que thérapeute et n’a ni l’expérience ni la légitimité pour parler des couples homosexuels.
1. Le sexisme
Le sexisme tel que l’entend Claude Steiner est un préjugé basé sur le sexe de la personne qui présuppose (mais pas toujours) une suprématie du mâle.
Ces préjugés sexuels sont néfastes aux deux partenaires, même quand ils ne donnent pas davantage de pouvoir et de privilèges aux hommes.
Les hommes et les femmes reçoivent des injonctions et des attributions qui les contraignent à endosser des rôles sexuels nuisibles et opprimants pour les deux sexes bien qu’ils soient encore plus opprimants pour les femmes que pour les hommes. Les injonctions liées préjugés sexistes vont en effet limiter la liberté des femmes mais également celle des hommes, même si cette entrave n’est pas de même nature ni de même ampleur (exemples : un homme, ça ne pleure pas; un homme doit prendre en charge sa famille d’un point de vue financier; un homme ne montre pas ses émotions…). Les préjugés sexistes sont toujours prégnants dans nos sociétés même si de plus en plus de personnes les dénoncent, les remettent en cause et arrivent dans une certaine mesure à s’en affranchir (il y a par exemple de plus en plus d’homme qui font le choix d’être des “hommes au foyer”).
Les scénarios que génèrent ces rôles sexuels empêchent les hommes et les femmes d’affirmer leur pleine puissance, de trouver l’intimité et de travailler ensemble. – Claude Steiner
Steiner rappelle que le mythe de la différence entre hommes et femmes est fondé sur la réalité de certaines différences quant aux organes génitaux, la force, la taille et éventuellement les émotions du fait d’une différence hormonale. Mais ces différences ne justifient pas les attentes dommageables de notre société sexiste envers les hommes et les femmes.
2. Le jeu de Sauvetage dans les relations de couple
Claude Steiner estime que chaque fois que nous entrons en relation avec quelqu’un d’autre, nous nous trouvons presqu’irrésistiblement poussés à adopter une position de dominant ou de dominé par rapport à cette personne.
Il précise que la position de dominé permet d’être en situation de demandeur, d’être plus impliqué, plus amoureux et moins sûr de soi; la position de dominant permet de ne pas être en situation de demandeur, d’être moins impliqué, moins amoureux et plus sûr de soi. La vie, dans l’approche de l’analyse transactionnelle, est vue comme une suite interminable de telles relations où chacun a sa position favorite.
Le jeu de Sauvetage prend tout son sens quand on l’envisage en relation avec les rôles de Sauveteur, Persécuteur et Victime. Ces rôles peuvent se manifester ouvertement, une personne se montrant impuissante pendant qu’une autre essaie de la prendre en charge ou de la persécuter, mais ils existent aussi sous des formes beaucoup plus subtiles.
Dès qu’une personne fait pour quelqu’un d’autre une chose qu’elle n’a pas envie de faire, on se trouve en face d’un Sauvetage; et souvent les victimes ne se rendent même pas compte qu’on les sauve. – Claude Steiner
Pour aller plus loin : Comment éviter d’entrer dans un triangle dramatique (Sauveteur, Persécuteur, Victime) ?
Le Sauveteur va faire quelque chose qu’il ne veut pas faire en présupposant que l’autre a forcément besoin de ce sauvetage et ne saurait se débrouiller seul. Le mot Sauveteur est ici à prendre comme un terme générique non genré : on peut être sauveteur ou sauveteuse.
Claude Steiner écrit que les gens sont toujours en train d’aller quelque part, de faire quelque chose, de participer à des activités quelconques en tant que Sauveteur parce qu’ils ont peur que ceux qu’ils auraient à « rejeter » soient blessés, mal à l’aise ou d’une autre façon, incapables de se prendre en charge.
On a affaire à un Sauvetage chaque fois que quelqu’un demande de l’aide et n’assume pas ensuite 50 % du travail.
Les gens peuvent être aussi Sauveteurs l’un de l’autre s’ils ne demandent pas ce qu’ils veulent par peur de la réaction de l’autre.
Steiner constate que beaucoup de couples mariés fonctionnent dans des Sauvetages mutuels où ni l’un ni l’autre n’ose dire ce qu’il veut. Lorsqu’on examine ces Sauvetages et qu’on encourage les gens à parler clairement et à demander à tout moment ce qu’ils désirent, on découvre souvent, et chez les deux partenaires, de grands mécontentements qui n’avaient jamais été exprimés et qui étaient totalement inconnus de l’autre.
C’est seulement à partir du moment où les situations de Sauvetages mutuels sont clarifiées qu’il devient possible d’arriver à un accord coopératif, respectueux des deux partenaires où chacun ose demander ce qu’il désire et obtient la satisfaction de ses besoins sans que l’autre doive renoncer aux siens. Dans ces cas-là, tout Sauvetage est éliminé.
Le principal frein à l’abandon des jeux de Sauvetage est l’habitude apprise dans l’enfance de dévaloriser ses propres besoins par rapport à ceux des autres.
Les gens doivent apprendre non seulement à reconnaître leurs besoins réels et à les exprimer sans crainte de représailles ou de rejet mais aussi à intégrer les besoins de l’autres dans l’équation sans les juger moins importants ou illégitimes.
3. Les jeux de Pouvoir
Claude Steiner définir le pouvoir comme la capacité d’obliger les gens à agir (force physique, place dans la hiérarchie sociale, magnétisme personnel, arguments convaincants, fonction professionnelle…). Les jeux de pouvoir sont des techniques qui permettent d’amener quelqu’un à faire ce qu’il ne veut pas faire.
Steiner envisage les jeux de pouvoir entre hommes et femmes mais il ne faut pas pour autant en déduire que ces jeux n’existent pas dans d’autres situations ou sont de nature différente. Le pouvoir n’est pas distribué également dans la société.
La plupart des êtres humains ont appris à se sentir à l’aise dans des relations de dominant/dominé ou de dominé/dominant (apprentissage réalisé dans la famille, à l’école, dans le système politique et culturel dans lequel les humains ont grandi). A quelques rares exceptions, les enfants apprennent qu’ils doivent obéir à certaines personnes qui sont en position d’autorité et traiter avec elles depuis une position de dominé.
L’organisation de la société a également enseigné aux enfants que les êtres humains de sexe féminin étaient de façon naturelle et appropriée dans une position inférieure à celle du sexe masculin, que les travailleurs sont inférieurs au patron, que les Noirs sont inférieurs aux Blancs, que les riches sont supérieurs aux pauvres…
Le résultat d’un tel apprentissage est qu’on accepte une distribution inégalitaire du pouvoir entre les êtres humains, qu’on s’y attend et que, finalement, on la recherche dans nos relations. S’il arrive qu’une égalité de pouvoir s’établisse dans une relation, cet équilibre sera facile à rompre pour laisser la place à une situation plus stable et connue de dominant/dominé. – Claude Steiner
En effet, les êtres humains se sentent à l’aise dans les scénarios qu’ils connaissent et ont tendance à rechercher naturellement les situations où l’un domine l’autre et à rejeter celles où le pouvoir est partagé équitablement, dans une optique de respect mutuel et de coopération.
Celui ou celle qui engage un jeu de pouvoir part du principe qu’il ou elle ne peut pas obtenir ce qu’il ou elle désire en faisant une demande claire, honnête et authentique, en exprimant des émotions et des besoins sans les travestir ou devoir donner des justifications, des preuves logiques.
Steiner écrit qu’il existe trois types de positions dans les jeux de pouvoir et que ces positions influencent les stratégies utilisées pour faire plier l’autre :
- position de dominant.e (techniques généralement utilisées : imposer une décision en mettant l’autre devant les faits accomplis, lancer le défi à l’autre de désobéir en lui exposant bien les risques auxquels il s’expose, demander une raison logique pour justifier le refus de l’autre et dénigrer cette raison, faire douter l’autre de ses propres émotions, recourir à des arguments d’autorité tels que “je suis le chef et c’est comme ça” ou “c’est moi qui gagne le plus d’argent dans cette famille donc c’est moi qui décide”, céder et le faire payer cher ensuite ou finalement refuser de faire ce qui a été décidé, utiliser la violence physique
- position de dominé.e (techniques généralement utilisées : faire quelque chose que l’autre ne désire pas pour perturber ses privilèges, éveiller la culpabilité du dominant, faire de la peine à l’autre pour se venger, faire perdre du temps et de l’énergie à l’autre, tomber malade…)
- pouvoir à peu près égal : l’escalade va vraisemblablement continuer jusqu’à ce que la bataille devienne sans fin et il est peu probable qu’un des partenaires puisse finalement gagner parce qu’ils ont approximativement autant de pouvoir l’un que l’autre ( ex : manipuler l’autre pour obtenir satisfaction sans prise en compte des besoins de l’autre, chercher à marquer un “but” pour marquer plus de points que l’autre)
Une relation saine est basée sur l’hypothèse d’un intérêt réciproque à faire des choses les uns pour les autres, d’une envie d’être ensemble pour se rendre la vie plus belle mutuellement sans devoir perdre une partie de ce qui est vivant en soi.
Dans une relation qui fonctionne bien, les deux partenaires obtiennent ce dont ils ont envie, mais dès que ce procédé coopératif échoue, la tentation est forte de revenir à ce qui est connu pour obtenir satisfaction : des jeux de pouvoir.
Lorsqu’on gagne en se servant des jeux de pouvoir, on contrôle la situation et on a pour récompense un sentiment de sécurité. Mais le contrôle et le pouvoir ne sont pas satisfaisants intrinsèquement. Aucune quantité de pouvoir ou de contrôle ne peut satisfaire pleinement les besoins d’un être humain. – Claude Steiner
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Source : Des scénarios et des hommes: Analyse transactionnelle des scénarios de vie de Claude Steiner (éditions Desclée De Brouwer)
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